Aujourd’hui, quel genre de peinture, quel genre d’exposition produisons-nous, envisageons-nous, défendons-nous, à titre individuel et collectif ? « Trouble in painting », à l’initiative de l’artiste Katharina Schmidt, professeur à l'institut supérieur des arts de Toulouse, est une exposition collaborative qui déplace les questions et notions de genre vers celles des pratiques picturales et curatoriales contemporaines. L’exposition produite par le BBB centre d’art s’inscrit dans le programme de recherche « Genre 2030 » de l’isdaT beaux-arts. _production BBB centre d’art, Toulouse _coproduction institut supérieur des arts de Toulouse _« Genre 2030 », projet de recherche porté par Katharina Schmidt et Hervé Sénant à l’isdaT, avec le soutien du ministère de la Culture et de la Communication, en partenariat avec le réseau delapeinture
« Trouble in painting » est un projet performatif qui réunit neuf artistes, un théoricien, une commissaire d’exposition, français, allemands, anglais et polonais pour des sessions de réflexion et de pratique collectives. Tous pratiquent l’art du déplacement à l’intérieur de leur discipline première, dans un désir partagé d’une mise en jeu de l’autorité : du medium peinture, de son histoire, de son intégrité, de son unicité, de son auteur, de sa mise en scène, de ses présentations et de sa représentation, et de la même manière du medium exposition, de son histoire, de son intégrité... Les espaces de rencontres sont physiques (Berlin, Paris, Toulouse) et virtuels (dropbox). Entre novembre 2014 et octobre 2015, les premières sessions publiques en France et en Allemagne prennent successivement la forme d’un workshop à la plate-forme d'exposition de l’école des Beaux-Arts de Berlin, suivi d’un workshop au BBB centre d’art – Toulouse, qui donne lieu à une exposition au BBB. Elle-même définira une journée d’étude avec l’institut supérieur des arts de Toulouse, qui ouvrira sur une conférence élargie à de nouveaux interlocuteurs en Allemagne.
Cécile Poblon
« Trouble in painting » fait clairement allusion au livre de Judith Butler « Gender trouble » qui, loin de schémas fixés une fois pour toutes, met en évidence le caractère ouvert, indéfiniment évolutif des représentations liant sexe et genre et appelle chacun à un jeu performatif. De la même manière, « Trouble in painting » cherche à mettre en évidence le caractère indéfiniment évolutif des représentations et des pratiques dont la peinture est l'objet, appelant à un jeu performatif qui déplace et déjoue clichés et attentes. Parmi les plus tenaces, celle qui voudrait que toute peinture soit l’affirmation d’un territoire singulier dont le peintre resterait invariablement l’auteur et trouve son prolongement dans une forme d’exposition qui impose qu’on isole nécessairement toute production sur un mur blanc. Les artistes, théoricien et commissaire réunis par « Trouble in painting » entendent non seulement semer le trouble dans cette convention, mais mettre en jeu le principe d’autorité dont elle découle, écartant au passage la notion d’auteur. A l’opposé d’une compétition de territoires, chaque situation de travail - conçue comme work in progress, du workshop au séminaire ou exposition- consiste bel et bien à ouvrir complètement à chacun le territoire commun dans un souci de recherche de coexistence dynamique où pratiques et identités se risquent à l’expérience du collectif, tentative qui n’est pas sans une part d’utopie revendiquée, à l’heure d’une crise qui se traduit jusque dans le monde de l’art dans le raidissement et la radicalisation de la concurrence.
Hervé Sénant
Télécharger les documents complets